Le contrôle des concentrations,
le cas Peguin Random House

Fin octobre dernier, un juge fédéral américain a bloqué le projet de rachat de la maison d’édition Simon & Schuster par la société Pinguin Random House. Cet accord, qui portait sur plus de 2 milliards de dollars, a été empêché à la demande du ministère de la Justice américaine. Ce dernier estimait en effet que la fusion permettrait à Pinguin Random House, qui est déjà la plus grande maison d’édition mondiale, d’avoir une influence déterminante sur les livres publiés aux Etats-Unis et sur la rémunération des auteurs. En effet, la fusion aurait permis à Pinguin Random House de détenir presque la moitié des parts du marché de l’édition aux Etats-Unis. Le ministère de la Justice considérait donc qu’elle était contraire aux lois antitrust, et plus précisément à l’article 7 de la loi Clayton. Ce dernier interdit en effet les fusions et les acquisitions qui auraient pour effet de réduire sensiblement la concurrence ou de créer un monopole. Cette loi oblige également les sociétés à notifier au Ministère de la Justice toutes les fusions ou acquisitions dépassant une certaine taille[1].

Lors du procès qui a duré treize jours, les débats ont principalement porté sur les conséquences de la fusion vis-à-vis des auteurs, et notamment sur le risque d’une baisse de leur rémunération. Plus précisément, le ministère de la Justice américaine arguait que la fusion proposée entraînerait une baisse des avances versées aux auteurs et, au final entrainerait une diminution du nombre de livres disponibles pour les consommateurs. Le célèbre auteur Stephen King a témoigné au procès en ce sens. La stratégie du ministère de la Justice était originale puisqu’en principe les arguments se focalisent principalement sur les risques pour les consommateurs et, notamment sur les risques de hausse des prix.

L’adjoint au Ministre de la Justice a déclaré que ce jugement «constituait une victoire pour les auteurs, les lecteurs et le libre échange d'idées». Il a ajouté que « la fusion proposée aurait réduit la concurrence, diminué la rémunération des auteurs, diminué l'ampleur, la profondeur et la diversité de nos histoires et de nos idées, et finalement appauvri notre démocratie »[2].

Les motifs du jugement sont pour l’instant tenus secrets afin de permettre aux parties d’en prendre connaissance en toute confidentialité. 


Corinne Boismain


Décembre 2022





[1] http://uscode.house.gov/view.xhtml?req=granuleid%3AUSC-prelim-title15-section18a&edition=prelim

[2] “Today’s decision protects vital competition for books and is a victory for authors, readers, and the free exchange of ideas,” said Assistant Attorney General Jonathan Kanter of the Justice Department’s Antitrust Division. “The proposed merger would have reduced competition, decreased author compensation, diminished the breadth, depth, and diversity of our stories and ideas, and ultimately impoverished our democracy.”