Dans l’arrêt Jakesy, la Cour suprême des Etats-Unis a fondamentalement limité les pouvoirs de l’autorité des marchés financiers américaine (Securites and Exchange Comission). Dans une décision rendue à la majorité de 6 juges (3 juges ont donc émis une opinion dissidente), elle a considéré que lorsque l’autorité des marchés financiers américaine réclame des dommages-intérêts ou une amende civile, les défendeurs ont le droit à un procès avec un jury.
En l’espèce, en 2013, l’autorité des marchés financiers américaine avait engagé des poursuites contre Monsieur Jarkesy et sa société Patriot28 pour fraude en valeurs mobilières. Entre 2007 et 2010, ce dernier a levé environ 24 millions de dollars auprès d’investisseurs qu’il aurait trompés notamment sur la valeur des fonds gérés par ses deux fonds d’investissement. En se fondant sur la loi Dodd-Frank l’autorité américaine des marchés avait choisi de régler le litige en interne plutôt que de saisir la justice fédérale. L’ordonnance rendue par la juridiction interne de l’autorité des marchés financiers a notamment condamné Monsieur Jarkesy et la société Patriot28 à restituer les gains frauduleusement acquis ainsi qu’à une amende civile de 300.000 dollars.
La Cour suprême des Etats-Unis a considéré que la question qui se posait était de savoir si le septième amendement de la Constitution autorise les défendeurs à réclamer et obtenir un procès devant un jury lorsque l’autorité des marchés financiers réclame des sanctions civiles dans un litige pour fraude. Pour répondre à cette question, elle explique qu’à la suite du Krach boursier de 1929, le Congrès américain a adopté une série de lois destinées à lutter contre la fraude en valeurs mobilières dont la loi sur les valeurs mobilières de 1933 (Securities Act). Pour appliquer ces différentes lois, il a également créé l’autorité des marchés financiers qui, en cas de constatation d’une fraude peut, à sa discrétion, saisir une juridiction fédérale ou statuer elle-même. Dans ce dernier cas, le défendeur ne sera pas jugé par un jury. Or, comme l’explique la Cour suprême en se fondant notamment sur l’arrêt Dimick v. Schiedt, le droit à un procès devant un jury est d’une telle importance et occupe une place si centrale dans notre histoire et notre jurisprudence que toute limitation de ce droit doit toujours être examinée avec la plus grande rigueur. Le septième amendement de la Constitution américaine garantit un jury pour les procès civils dont le montant excède 20 dollars et relevant de la common law (et non de l’équité (equity)). La question subsidiaire qui se posait était donc de savoir si le litige en cause relevait de la common law. La Cour suprême a estimé que le facteur fondamental pour répondre à cette question était la nature des sanctions demandées par l’autorité des marchés financiers. Or, les dommages-intérêts et l’amende civile sont des sanctions relevant de common law contrairement aux injonctions par exemple qui relèvent de l’équité. La Cour suprême rappelle que le Congrès américain ne peut pas prendre des dispositions contraires à la Constitution. En conséquence, le défendeur, conformément au septième amendement de la Constitution américaine, était en droit de demander et d’obtenir un procès devant un jury.
Juillet 2025